Réciproque en action

« Si l´engourdissement est l´apanage de l´humanité »*, elleux sont bien réveillé.e.s

22/10/2025
Dimanche sans voiture, les passant.e.s se réapproprient la rue. À pied, à vélo, sur les terrasses. Pour Drissia, Klea, Youssra, Ance, Sinou, Imane, Charlotte, Gonzague, Ousmane, Adrien, Mouna, Vinciane ce sera sur scène. Devant les Halles de Schaerbeek.

Le ciel est gris.

 

Dans les halles, ça fourmille. Le Poetik Bazar bat son plein, toustes lesamoureux.ses de la poésie sont au rendez-vous. Les stands regorgent de petitstrésors, de carnets faits mains, de cartes postales poétiques, de recueilsillustrés. Une petite cabane douillette et colorée, dans le fond, abrite lesplus petits, il n´y a pas d´âge pour la poésie.

 

Le ciel est bas. On le surveille du coin de l´oeil.

 

Iels sont impressionné.e.s par cette petite scène, pas plus de trentecentimètres de hauteur. Zéro distance avec le public. À la lumière du jour pasde faux-semblants, iels pourront lire l´écho de leurs mots sur les visages quiles entourent. Inès, en maîtresse de cérémonie avisée, accompagne leur montéesur scène d´un mot soutenant, d´une anecdote qui déride, d´un sourire quiencourage.

 

Un vélo passe, faisant tinter allègrement sa sonnette.

 

Un peu fébrile, Ousmane ouvre le bal. Les poètes n´ont pas disparus. Riende plus facile à démontrer, puisque « slameur.se.s, rappeur.se.s,chanteur.se.s, conteur.se.s » vont s´emparer du micro après lui.

Sinou  « Les femmes ne meurent pas par hasard » Anne Bouillon

Le baffle des voisins chante sur le trottoir d´en face.

 

Invité à voyager au bord d´un bateau sans capitaine, Adrien nous parle de « Ceuxque la vie ennuie/Ceux dont on a soufflé le feu, ne laissant qu´une flammèchefébrile/Qui se complaisent dans la stagnation, l´inaction, l´indifférence dedemain […[ Ceux qui attendent inlassablement que quelque chose vienne, change,bouscule. » alors que Drissia nous prend par la main pour partir versle Sud, dans un voyage intime et ainsi reconstruire « le lien auxautres, le lien à l´instant, le lien aux choses simples […[ l´art d´êtreensemble. »  

 

Une alarme se déclenche, les voitures ne veulent pas se laisser oublier.

 

La sonnerie stridente fait écho à la voix de Vinciane qui appelle au réveildes citoyens : « Nous dormons à poings fermés quand il est tempsde se lever le poing levé ».

 

Le vent se lève.

 

Les feuilles s´envolent, quatre mains ne sont pas de trop pour les retenir.Ance se précipite pour fixer les mots au pupitre, pour que Sinou ne perde pasla cadence. Elle nous balance ses vers, aussi intimes qu´universels :

« J´ai peur du regard qu´on peut me porter

J´ai peur des remarques qu´on peut m´adresser

J´ai peur de l´avenir qui va bientôt arriver

J´ai peur de ce vide que je ne peux combler

J´ai peur de l´instant où les lampadaires commencent à s´allumer

J´ai peur dès que je vois une ombre derrière moi marcher

J´ai peur de la nuit avec tous ces prédateurs

[…[

J´ai peur du bruit de leur pas derrière moi

J´ai peur que tout d´un coup, je sente leur main »

 

Le restaurateur du food truck, lui, scande le nom des dévoreur.se.s d´hamburgers.Laura. Claire. Samir.

Vinciane « Comment on va faire pour se réveiller on dort si profondément » Kae Tempest

 

Le vent souffle. Quelques gouttes.

 

Le public s´enroule dans des écharpes, glisse les mains dans les poches,s´abrite sous une capuche. Mais il ne bouge pas. Il reste là, les yeux et les oreillesgrands ouverts. Hypnotisé par leur charisme, admiratif de leur force, avide de leursphrases.

 

Iels insufflent l´énergie, le désir de renouveau, d´enthousiasme qui réunit,l´exaltation qui porte les individus dans des luttes communes.

 

« Depuis la nuit des temps, l´humanité a eu son lot d´insomniaquesrévolutionnaires qui ont fait sonner le réveil avant que ne sonne le glas. Ils ontporté l´étendard du changement, pour faire du progrès notre nouveau blason »*.

 

Nous savons qu´iels sont de celleux-là.

De celleux que ni sonnette, ni baffle, ni alarme ne feront taire.  

Youssra et Ance « Ce n’est pas par la tête que les civilisations pourrissent. C’est d’abord par le cœur » Aimé Césaire

 

*Texte de Vinciane, inspiré d´un vers de KaeTempest « Comment on va faire pour se réveiller, on dort siprofondément ? »

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